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Entretien avec Enguerrand Habran

Directeur opérationnel et co-fondateur - Chaire innovation BOpA

Retranscription de l'entretien


Pouvez-vous vous présenter ?

Bonjour, Enguerrand Habran, directeur du Fonds Recherche & Innovation de la Fédération Hospitalière de France (FHF) et directeur des opérations de la chaire Innovation sur le bloc opératoire augmenté à l’AP-HP. Initialement, je suis ingénieur en biotechnologie. Après, j'ai créé une startup dans le domaine de l'intelligence artificielle, il y a plus de dix ans. On appelait ça de la science-fiction à l'époque, quand on en parlait. Et puis après, j'ai monté une association dans le domaine de la e-santé où on réunissait des gens du numérique, des gens du design et bien évidemment des professionnels de santé pour innover dans le domaine, justement, de la santé numérique. Et puis en 2016, j'ai rejoint le Fonds Recherche & Innovation de la FHF. Et en 2020, avec le professeur Éric Vibert, on a créé la chaire innovation sur le bloc opératoire augmenté.

Quelle est votre définition de l'innovation ?

Alors, ma définition de l'innovation, c’est une vaste question. C'est une question qu'on s'est beaucoup posée, notamment au Fonds Recherche & Innovation. Je dirais que pour moi, il y a deux types d'innovations.

La première innovation qui est basée sur l'usage et la définition que j’en donnerai, c'est que c'est la rencontre, justement, d'une invention et d'un usage dans le but d'apporter une amélioration. Donc l'invention, elle peut être de tout type, elle peut être technologique, elle peut être organisationnelle, peut être humaine. Il n'y a pas de limites, elle peut être commerciale aussi. Ça peut être un nouveau business model ou un nouveau mode de distribution.

Et la deuxième, je dirais que ce sont les innovations qui ne sont pas basées sur les usages, typiquement, les médicaments ou les technologies qui sont en back-office ou des choses comme ça. Et donc, là, c'est encore une fois l'apport d'améliorations, mais ce n'est pas la rencontre en fait entre un usage et une invention, c'est plutôt la rencontre entre un problème technique ou physique, justement, et une invention. Donc il y a, dans les deux cas, toujours la notion d'invention et dans les deux cas, toujours la notion d'apport d'amélioration. Une innovation qui n'apporte pas une amélioration, ce n'est pas une innovation.

Quelle est votre définition du management de l'innovation ?

Alors ma définition du management de l'innovation, elle est bien évidemment en lien avec ma définition de l'innovation. Pour moi, justement, le management de l'innovation, c'est gérer, en fait, l'apport continu d'améliorations de manière collaborative, agile et itérative. Centrée sur les usages quand c'est une innovation basée sur les usages. Centrée sur l'évaluation de l'amélioration quand elle est purement technique ou technologique.

Comment a été menée la création de la chaire innovation BOpA ?

Alors la Chaire Innovation BOpA, c'est une structure assez particulière puisque c'est un accord-cadre entre un établissement de santé, l’AP-HP, et puis deux établissements d'enseignement supérieur et de recherche, l'Institut Mines Télécom et l'université Paris-Saclay.

Et donc ça a commencé, en fait, par la rencontre entre ces gens pour justement essayer de définir des objectifs communs. Un plan sur plusieurs années, de ce que l'on souhaitait faire, de comment on souhaitait s'organiser pour mener justement toutes ces innovations. Et donc, il y a d'abord eu l'élaboration de ce plan. La définition après, dans l'accord-cadre de ce plan-là, on l'a vraiment inscrit juridiquement. Et puis la signature de cet accord pour se lancer.

La création de la chaire innovation BOpA a-t-elle été comprise par vos collaborateurs ?

Alors il y a trois types de collaborateurs. Il y a les collaborateurs de l'AP-HP, des collaborateurs de l’IMT, les collaborateurs de l'université Paris-Saclay. Et puis il y a d'autres membres associés.

Je dirais que ça bouleversait un peu les choses, au début, parce que forcément, on est sur une nouvelle façon de faire. On n'a pas de structure juridique en tant que telle. Comme je le disais pour l'instant, la Chaire Innovation BOpA, c'est un accord-cadre et donc c'est vrai que beaucoup de processus était fait pour faire de la recherche et pas forcément pour faire de l'innovation. Et donc on a dû un peu tordre certains processus. On a dû un peu accompagner les équipes sur un changement de mentalité. Mais je dirais que la dynamique apportée par la chaire et tous les effets collatéraux de l'innovation, ont fait que les gens se sont assez vite mis en ordre de marche pour que tout fonctionne bien. Et désormais, ça tourne plutôt bien. Que ce soit sur la DRCI, côté groupement universitaire Paris-Saclay, à l’AP-HP. Que ce soit au niveau des fondations, parce que la Chaire Innovation BOpA est financée par des fondations. Aujourd'hui, voilà, tout le monde est vraiment en ordre de marche. Ça a nécessité, bien évidemment, un temps d'acculturation. Mais maintenant, je dirais que les choses se passent très bien et les gens sont relativement très enthousiastes.

Quels avantages apporte la Chaire innovation BOpA ?

Les principaux avantages de la création de cette chaire, ça va avec ce que je viens de dire, c'est-à-dire que les principaux avantages ont été de créer des processus dédiés à l'innovation. Beaucoup d'établissements de santé, en fait, font de la recherche et gèrent l'innovation de la même manière que la recherche. Or, ce n'est pas la même chose. La recherche, quand elle est fondamentale, elle produit de la connaissance. Quand elle est appliquée, elle produit des inventions. Mais les inventions ce n'est pas de l'innovation. Et donc, on a une culture à apporter qui est différente. On a des process à apporter qui sont différents. On a de la méthodologie à apporter qui est différente. Ce ne sont pas les mêmes compétences quand on gère la recherche ou quand on gère de l'innovation, et ce n'est pas non plus la même temporalité.

Donc le gros avantage d'avoir mis en place la chaire innovation BOpA, c'est que justement, on a vraiment une organisation qui est dédiée à faire de l'innovation au bloc opératoire.

Existe-t-il des dynamiques communes entre la recherche et l'innovation ?

Alors, oui, il y a des dynamiques communes. Il y a des dynamiques communes sur deux aspects. Le premier aspect, c'est le transfert de technologies. En fait, forcément, il y a toujours des questions de négociations juridiques, ou quelque chose comme ça, quand on va, aller chercher, pour faire de l'innovation, des choses qui étaient à l'état de recherche. Parce que l’on a produit une nouvelle connaissance, parce que l'on a produit une invention et on veut la valoriser, lui trouver un usage et faire de l'innovation.

Et puis le second aspect, ce sont les aspects de contractuels, de co-développement. Parce que l'innovation, comme pour la recherche, ce n'est pas un travail qui se fait seul. C'est un travail qui se fait en équipe de manière collaborative, et généralement collaborative entre organisations. Et donc bien évidemment, la DRCI nous accompagne sur ces aspects-là.

Quels sont les objectifs de la chaire innovation BOpA ?

Alors, la Chaire BOpA, elle a plusieurs objectifs, mais ils concourent tous autour d'un même, grand objectif. C’est améliorer l'expérience patient et réduire l'erreur au bloc opératoire. Parce que l'erreur, elle va être le signe de complexité postopératoire, voire d'augmentation de la mortalité.

Et donc l'objectif de la Chaire Innovation BOpA, c'est vraiment de faire des innovations pour justement réduire l'erreur au bloc opératoire. Et on ne peut pas réduire l'erreur au bloc opératoire, si on ne travaille pas le préopératoire, et donc si on ne prépare pas l'amont. Et donc si on prépare l’amont forcément le patient, au bloc opératoire, il est endormi, mais en amont, il ne l’est pas, endormi. Et donc on travaille aussi sur l'amélioration de son expérience et c’est mieux lui faire comprendre les choses, pour avoir une meilleure adhérence aussi aux traitements qu'on va proposer, aux opérations qu'on va proposer. Mais tout ça, c'est vraiment un seul et même objectif, c'est de concourir du coup à la réduction de l'erreur. Et donc ça va se faire par la télé-expertise, par des jumeaux digitaux, par capter les données pour savoir là où il y a eu des erreurs et comment les éviter la prochaine fois. Travailler sur le facteur humain parce que le bloc opératoire, c'est un travail d'équipe, donc le facteur humain est extrêmement important. Ça va être aussi de travailler sur la robotique et la cobotique, aussi, pour dans certains cas, justement, être assistés par des robots ou des cobots pour nous aider à opérer. Ça va être travaillé sur des nouvelles longueurs d'onde pour, justement, voir des choses que l'œil humain ne voit pas. Et puis également travailler sur l'accès à la connaissance, au bloc opératoire, avec des systèmes de chat-bot, ou des choses comme ça. Les approches sont multiples, mais l'objectif est commun. C'est toujours la réduction de l’erreur.

Quel est le positionnement de la chaire innovation BOpA au sein de l'établissement ?

Alors, comme je l'ai dit, la Chaire Innovation BOpA, c’est un accord-cadre. Donc, il y a les médecins de l’AP-HP, ils ont les rapports hiérarchiques qu’ils avaient initialement avec l’AP-HP. Les ingénieurs de l'institut Mines Télécom, c'est la même chose avec. Pareil pour les intervenants de Paris-Saclay. Et puis après, il y a des gens, dédiés à la chaire, qui sont eux financés par la fondation.

Et ce que l'on a mis en place, comme c’est multi-partenarial. On a mis en place, un comité de pilotage qui regroupe, en fait, les différents organismes qui le fondent, ainsi que les différents organismes partenaires, puisqu'il y a aussi l’Inria et le CNAM. Et puis les membres du comité des mécènes, parce que c'est donc c'est financé par des fondations et par des mécénats industriels. Et donc on a ce comité de pilotage qui se réunit deux à trois fois par an, et qui pilote les grandes orientations de la Chaire innovation BOpA.

Et puis concrètement, tous les jours, on a le professeur Vibert, qui est titulaire de la chaire innovation et un directeur des opérations qui l'accompagne et qui pilote les différents programmes et projets d'innovation.

Quel est son positionnement vis-à-vis de l'écosystème économique ?

Alors la chaire innovation, elle est, bien évidemment, très écosystémiques parce qu'en fait son processus, ce sont les professionnels de santé viennent exprimer un besoin et on va essayer de trouver en fait un challenger, quelqu'un qui peut venir répondre à ce besoin. Et donc, se challenger, il fait forcément partie de l'écosystème. Donc la première chose, c'est bien évidemment l'écosystème de l’AP-HP, de l'Institut Mines Télécom et de l'université Paris-Saclay. Donc cet écosystème, il est déjà, en fait, rempli de challengers. Ça peut être des chercheurs, ça peut être des startups, ça peut être des grands groupes avec lesquels ces organisations travaillent. Et puis, il y a aussi l'écosystème des mécènes, en fait, qui eux-mêmes, sont entourés de tout un tas de partenaires et qui viennent apporter des challengers. Et on va forcément, après, travailler avec ces organisations-là, de, je dirais, quatre manières.

La première manière, ce sont les professionnels de santé apporte un besoin et on a une idée de comment on pourrait le résoudre. Et donc on va faire un PoC, une preuve de concept, et on va voir si à la fin de cette preuve de concept, on arrive à prouver qu'on peut travailler ensemble et résoudre le problème ensemble. Donc on décidera de travailler ensemble.

La deuxième, qui peut être en continuité de la première, c'est le co-développement. C’est-à-dire, là, je sais déjà que j'ai des technologies ou des approches qui permettent de résoudre ce problème. Et donc ce que je vais faire, c'est que je vais m'associer, avec la chaire Innovation BOpA et ensemble, on va développer une nouvelle solution.

La troisième, qui est encore en continuité de la deuxième, mais qui peut aussi arriver directement. C’est, j'ai déjà en fait quelque chose qui existe et donc là, je vais la tester. Je vais l'évaluer et je vais l’optimiser. Et donc là, encore une fois, on va construire.

Et puis la dernière façon de collaborer, c'est l'inverse. C'est une entreprise, en fait, qui vient nous voir et qui dit : “Écoutez, j'ai cette solution ou cette technologie-là. Qu'est-ce que je pourrais en faire au bloc opératoire ? Qu'est-ce que je pourrais en faire pour justement réduire l'erreur au bloc opératoire ?”. Et donc là, on va plutôt créer une réunion interdisciplinaire, avec des chirurgiens, des anesthésistes, des IBODEs, des IADEs, enfin tous les opérateurs du bloc et on va essayer de trouver une utilité potentielle à cette technologie. Et une fois qu'elle sera trouvée, on partira justement donc sur un PoC, un co-développement ou un test/évaluation si ce n'est pas une technologie, mais une solution relativement avancée.

Comment est-elle organisée et quels sont ses moyens ?

Alors la Chaire Innovation BOpA, elle est organisée en blocs, un bloc, c'est une équipe. Donc cette équipe, elle est forcément gérée par un professionnel de santé, un chirurgien, un anesthésiste, un IBODE ou un IADE. Et donc cette équipe, elle va travailler sur un sujet.

Il y a un bloc “Human Factor” qui travaille surtout le facteur humain (l'amélioration des équipes, l'efficience organisationnelle, le dialogue médecin-malade), vraiment tous les aspects humains. Et puis après, il y a des blocs qui vont être plutôt sur des approches technologiques.

  • On a un bloc “Viz” sur tout ce qui est vision au bloc opératoire. Donc ça peut être des lunettes de télé-expertise, qui font que l’on a l'impression d'être à la place du chirurgien et donc l'expert à distance peut vraiment voir ce que voit le chirurgien et le conseiller au mieux.
  • Il y a le bloc “Bot” qui travaille sur tout ce qui est accès à la connaissance. Et donc comment, en fait, on peut automatiser la création de connaissances ou l'accès à la connaissance. Et on développe notamment un chat-bot au bloc opératoire qui est capable de nous répondre sur la question qu'on pose pendant qu'on est en train d'opérer.
  • Il y a le bloc “Wave” qui travaille sur tout ce qui est longueur d'onde. Et donc on travaille sur la fluorescence, la spectroscopie par exemple, pour voir des choses que l'œil humain ne voit pas ou pour quantifier, par exemple, des niveaux de gras dans les greffons pour tester justement le niveau de stéatose pour savoir si le greffon va être utilisable ou pas. Et ce, de manière extrêmement rapide et extrêmement précise.
  • On a le bloc “Avatar” qui travaille sur tout ce qui est jumeau digital. C’est-à-dire, des simulations hautes-fidélités, en fait, de l'organe, du patient et tout ça. Ce qui va nous permettre de nous entraîner, en fait, avant l'opération. Ou justement, pendant l'opération, de nous accompagner sur ce qu'on fait. De voir, par exemple, qu'à travers l'organe avec des jumeaux digitaux anatomique.
  • Et puis on a deux autres blocs qui sont le bloc anesthésie. C'est typiquement tout ce qui est aide à la décision en situation critique.
  • Et puis le bloc robotique et cobotique qui lui travaille, comme son nom l'indique, sur les robots et les cobots.

Et puis après, on a une équipe data, qui est là pour collecter de la donnée et enrichir cette donnée pour qu’après les différents ingénieurs des différents blocs, justement, puisse avoir de la donnée pour entraîner notamment les modèles d'intelligence artificielle.

Et tout ça, c’est coordonné par un directeur des opérations, qui lui va aider, en fait, à piloter tous les projets et faire le lien, bien évidemment, avec la DRCI de l’AP-HP, la Direction recherche et innovation de l’IMT, les différentes fondations, les laboratoires de recherche à l’IMT, à Paris-Saclay et à l'Inria. Enfin, voilà de faire le lien avec tous les partenaires et toutes les tutelles.

Et puis, d'un point de vue financier, je l'ai déjà évoqué, la chaire innovation BOpA, elle est financée par les fondations, la fondation de l’AP-HP, la fondation de l’IMT et la Fondation de l'université Paris-Saclay. Et donc ce sont des mécènes, généralement, des grands industriels du domaine de la Medtech, de l'assurance ou de l'hôpital de manière plus générale, qui ont envie de soutenir ces approches d'innovation fait directement par les hospitaliers pour les hospitaliers. Et qui du coup s'inscrit avec nous dans cette aventure, en faisant un don à l'une des trois fondations qui après nous reversent les finances.

Vous êtes-vous inspiré d'autres modèles ?

Alors, je me suis surtout inspiré en fait de mon expérience. C'est-à-dire que ce soit dans la société que j'avais monté dans le domaine de l'intelligence artificielle, dans l'association, justement, on faisait du co-développement entre tous ces cœurs de métier et puis bien évidemment mon métier à la fédération. Et aussi le MOOC innovation qu'on a fait au Fonds FHF ou bien évidemment, le programme Hospi’Up sur la collaboration entre Hôpitaux et startups. En fait, tous ces programmes-là, où justement, on a été voir ce que des gens faisaient à travers la France et le monde. Qu'on a pu éprouver dans des tonnes d'établissements, tout un tas de méthodes. Et bien tout ça, je me suis dit comment on met ça en ordre pour, justement, essayer de faire l'organisation la plus efficiente possible en termes d'innovation.

Et donc c'est beaucoup de méthode et c'est très écosystémique. Ce sont vraiment les deux facteurs clé. Voilà avoir un écosystème relativement complet qui peut répondre à tous les besoins. Et puis, avoir les bonnes méthodes pour savoir mettre tout ça en ordre.

Depuis sa création, qu’a-t-elle apporté à votre établissement ?

Depuis sa création, la chaire innovation BOpA, je pense qu'elle a apporté beaucoup de choses.

L'innovation, elle a tout un tas d'effets collatéraux et notamment l'attractivité. Et donc on a beaucoup de jeunes chirurgiens, en fait, qui sont intéressés de venir travailler à BOpA et donc ils viennent travailler au Centre Hépato-Biliaire.

Elle a apporté aussi encore plus de visibilité industrielle sur justement les projets d'innovation au bloc opératoire que fait l’AP-HP. Parce que BOpA, c'est aussi une marque, en fait, et donc cette marque elle est hautement valorisable. Donc elle a aussi une attractivité industrielle.

Donc de l’attractivité professionnelle et de l'attractivité industrielle.

Et puis elle ré-apporte aussi une dynamique parce que toutes les équipes, je vous dis, il y a eu vraiment un engouement qui s'est créé. Et que ce soit la DRCI de l’AP-HP qui est vraiment à fond derrière le projet, et la fondation de l’AP-HP aussi, bien évidemment, l'Institut Télécom et l'université Paris-Saclay.

Donc tout ça en fait, ça crée une dynamique relativement enthousiaste. Et forcément, ça apporte beaucoup de choses aux différentes organisations. Parce que, comme je l'ai dit, attractivité, mais aussi la dynamique énergie et toutes ces choses-là qui sont extrêmement importantes dans les organisations.

Quelles sont vos prochaines échéances importantes ?

Alors... Les prochaines échéances, ça va être justement de la restructuration.

C'est-à-dire que BOpA a déjà beaucoup produit, beaucoup collecté d'argent, beaucoup de choses. Il y a une vingtaine de projets qui sont menés actuellement, en parallèle. Il y a plusieurs solutions qui sont déjà devenues des solutions commerciales, et il y en a d'autres à venir. Il y a même eu la création déjà d'une première société. Et on veut pérenniser, ce modèle, cette organisation. Du coup, on va très probablement devoir sortir de l'accord-cadre classique. Ou en tout cas, il va falloir qu'on trouve une organisation optimale pour pouvoir continuer à faire notre activité, mais pas forcément en étant dépendant du mécénat. Je dirais que le mécénat, c'est un booster, ça aide à démarrer. Mais après, il faut trouver des modèles pérennes pour pouvoir continuer ces organisations. Donc notre prochaine échéance, c'est ça. Il y a notamment des programmes nationaux et européens, auxquels on a concouru et auxquels on est, ou on sera peut-être lauréat, qui vont nous aider justement à nous structurer sur cet aspect.

Selon vous, quels sont les facteurs clés de succès ?

Alors les facteurs clés de succès, j'en ai déjà parlé. Pour moi, il y en a trois. Déjà, c’est de décorréler la recherche et l'innovation. Ce n'est pas la même chose, mais vraiment, ce n'est pas la même chose. Ça fait six ans que je me bats à la Fédération Hospitalière pour que justement la communauté hospitalière comprenne ça. Et les mentalités ont pas mal changé. Il y a des établissements aujourd'hui qui ont vraiment décorrélé les deux, ou en tout cas, qui ne gèrent pas les deux de la même manière. Même si après il y a une entité qui va regrouper les deux parce qu'il y a, bien évidemment, une continuité, mais ce n’est pas forcément nécessaire. Donc le premier facteur, justement, c'est ça décorréler la recherche de l'innovation, et prendre conscience qu'en fait, ce n'est pas la même chose, donc ça ne se gère pas de la même manière.

Le deuxième aspect, c'est l'écosystème. C'est assez difficile de faire de l'innovation tout seul. Après, le paradoxe, c'est que l'hôpital est aussi un écosystème en tant que tel. Il y a beaucoup de métiers différents à l'hôpital. Donc, oui, aller chercher les compétences ailleurs, mais faites attention de ne pas frustrer les gens qui ont les compétences en interne. Mais après, il y a des compétences qui ne sont, bien évidemment, pas à l'hôpital.

Et le troisième, et pas des moindres, c'est la méthodologie. C’est-à-dire qu'il y a vraiment de la méthodologie pour faire de l'innovation. On a produit des programmes sur le sujet. Donc, vraiment, n'hésitez pas, à aller vous former aux méthodologies parce que vous verrez qu'avec les bonnes méthodologies, on peut faire des choses assez incroyables, même sans forcément un écosystème très vaste, ou beaucoup de moyens financiers.

Si vous deviez recommencer, que feriez-vous différemment ?

Alors qu'est-ce qu'on ferait différemment ? Je ne sais pas, parce qu’on a fait des erreurs, mais ça fait partie du parcours. C’est-à-dire qu'il y a des partenaires qui peut-être, ont été déceptifs. Mais ça permet aussi de les comprendre et de comprendre leurs limites. Parfois, on a été surchargés de travail, mais ça veut dire que voilà, on a fait aussi un très bon travail et on n'aurait pas pu l'anticiper. Je pense que voilà les erreurs, ça fait partie de l'aventure, il faut les accepter, il faut les intégrer et il faut en apprendre à chaque fois.

Selon vous, pourquoi est-il nécessaire d'organiser le management de l'innovation ?

Le meilleur argument pour moi, il est assez simple, c'est que ma définition de l'innovation, elle prend toujours en compte le fait que l'innovation ça apporte, en fait, une amélioration. Alors, elle peut être continue ou disruptive. Mais gérer l'innovation, ça veut donc dire, en fait, mettre en place dans son établissement un système de gestion de l'amélioration de potentiellement l'intégralité de ces processus.

C’est-à-dire que, voilà, être une organisation qui s'améliore en permanence. Je pense que c'est le seul moyen de ne pas se faire dépasser.

Personnellement, qu'est-ce que cette aventure vous apporte ?

Alors, moi personnellement, déjà, ça m'a conforté dans mes connaissances. Comme je l'ai dit, BOpA, c'est un peu la version optimale de tout ce qu'on a appris avec mes équipes sur l'accompagnement de l'innovation. Tout ce que j'ai fait dans mes expériences précédentes et tout. Et quand je vois le succès, en fait, qu'a la chaire innovation, je me dis que voilà aujourd'hui, personnellement, je maîtrise le sujet du management de l'innovation et donc, c'est un accomplissement professionnel. Et puis, ça marche aussi très bien parce que c'est une bande d'amis qui se fendent la gueule et qui sont passionnés, qui font leur passion tous ensemble. Et donc j'ai rencontré humainement, plein de gens relativement exceptionnels.